Vous connaissez certainement le principe de Battle Royale. 42 lycéens sont débarqués sur une île déserte livrés à eux-mêmes. Ici ce n’est pas Sa majesté des mouches, ils vont être poussés à se battre et même à tuer pour survivre. La règle a le mérite d’être claire : à la fin il ne doit rester qu’un seul survivant. Comme ce Battle Royale est avant tout un show, il faut éviter qu’il ne se passe rien – souvenez-vous du spectacle affligeant donné par les candidats de télé-réalité avachies au soleil près de la piscine. Pour cela rien de tel que d’équiper chaque participant d’un collier explosif – dans Battle Royale pas en télé-réalité – et de déclencher une explosion arbitraire et meurtrière si au moins une élimination – c’est à dire un mort – n’a pas été comptabilisée dans la journée. Pour être à même de se défendre et de survivre, chaque participant se voit remettre un sac contenant de la nourriture ainsi qu’une arme – vous voyez qu’ils ne sont pas si méchants. Pour pimenter le tout et ajouter encore un peu d’injustice à une ardoise déjà bien chargée, chaque arme est différente. Le panel va du boomerang – hé oui c’est une arme avant d’être un gadget dangereux destiné aux enfants – à l’arme automatique. Ah oui, j’ai oublié de préciser un détail. Les lycéens en question se connaissent très bien puisqu’ils font partie d’une même classe – sinon se serait trop facile de s’entretuer sans le côté affectif qui fait hésiter au moment de donner le coup de grâce.

Je n’avais pas envie de réfléchir et voulais lire quelque chose de bourrin. Sur ce point au moins, je n’ai pas été déçu. Par contre sur le reste, j’ai un avis plus réservé qui commence par un blocage sur les dessins. Le style ne me plaît pas du tout et ce sentiment désagréable est renforcé par les expressions ultra exagérées des personnages – ils ont en permanence le nez qui coule et les yeux qui pleurent. On comprend bien la souffrance qu’ils peuvent subir dans cet environnement hostile mais là, pour le coup, on a plutôt envie de leur dire, comme à certain collègues de boulot, “prend un kleenex et arrête de renifler”. Pour faire le lien avec le fond, cette souffrance est omniprésente et souvent accompagnée d’énormément de violence qui, à ce niveau, s’apparente plus à de la sauvagerie. On n’est pas dans la finesse, dans l’évocation, rien n’est suggéré, tout est exposé sous les yeux du lecteur avec la plus grande cruauté. Enfin, le scénario qui tient par essence un peu en haleine ne tient par contre pas toutes ses promesses.

C’est au final un manga assez dérangeant que j’ai laissé tomber après la lecture de quelques tomes. Peut-être que le livre dont il est issu est plus réussi car l’idée est intéressante et peut illustrer efficacement certaines dérives de notre société comme le voyeurisme et la marchandisation des êtres humains.


Koushun Takami et Masayuki Taguchi, Battle Royale #1, Soleil, coll. « Manga », 2003, Amazon.