La guerre par d'autres moyens

La politique, c’est la guerre continuée par d’autres moyens. C’est à cette citation de Clausewitz que Karine Tuil a emprunté le titre de son dernier livre. Il mêle politique et cinéma post MeToo. Ce sont des sujets qu’elle aborde régulièrement et elle est plutôt à l’aise dans ce domaine. Sur le plan technique, il faut souligner la présence d’une narratrice qui fait partie de l’histoire et qui parle, lorsqu’elle est concernée, à la première personne du singulier. Le roman est prenant, clair et intéressant, elle maîtrise son sujet. Elle fait du roman, difficile donc de lui reprocher que ses livres sont trop romancés. Rien à dire donc, enfin presque, l’histoire est parfois cousue de fil blanc et les personnages stéréotypés, mais ça fait partie du genre et c’est le peut-être le prix à payer pour écrire un roman qui reste facile d’accès. ...

La décision

Certaines décisions sont lourdes de conséquences. À la fin de mon instruction, je dois déterminer si j’ai suffisamment de charges pour que ces individus soient jugés par d’autres. C’est une torture mentale : est-ce que je prends la bonne décision ? Et qu’est-ce qu’une bonne décision ? Bonne pour qui ? Le mis en examen ? La société ? Ma conscience ? Comme dans Les choses humaines, ce roman de Karine Tuil se déroule dans le milieu judiciaire – elle est juriste de formation. Cette fois c’est le grand sujet de la lutte contre le djihadisme qui est abordé en mettant en scène une juge antiterroriste. On y retrouve les éléments de la réalité que sont les différents attentats qui ont endeuillé la France et des éléments de fiction. L’autrice fait le parallèle entre le domaine professionnel et privé et souligne la porosité entre ces deux univers. ...

Les choses humaines

Je ne sais pas si le sous-genre existe, mais je parlerais volontiers pour ce livre de trib lit ou littérature de tribunaux. Les passages se déroulant dans un tribunal ne couvrent pas la totalité du livre, mais une bonne partie qui est plutôt convaincante, comme le reste du livre d’ailleurs. Karine Tuil s’est inspirée d’un fait divers qui a eu lieu à Stanford en 2016 pour embrasser d’une façon plus large la prise de conscience et de parole connue sous le nom de Me Too ou de l’explicite BalanceTonPorc en version française. Je trouve sa position en tant qu’auteur (ou autrice) parfaite. Elle dépeint une situation suffisamment ambiguë pour que le lecteur puisse non seulement se faire sa propre idée, mais aussi saisir la complexité de certaines affaires et cheminer sur l’étroite ligne de crête qu’il faut emprunter pour tenter de faire la lumière. ...