En janvier 2013, Le Magazine littéraire a consacré un dossier sous-titré La fabrique d’un monde à l’auteur de fantasy J. R. R. Tolkien. Ce dossier passionnant et très complet a été grandement alimenté par la récente publication d’un Dictionnaire Tolkien1 aux éditions CNRS. Sa lecture m’a évidemment appris beaucoup de choses – je dois confesser ma méconnaissance du sujet malgré un intérêt constant mais lointain entretenu depuis des années pour cet écrivain et son oeuvre. La plus structurante concerne le processus de création que suivit Tolkien. Il était professeur de langue et de littérature anglaises à Oxford et philologue de formation. Passionné par cette discipline qui étudie la linguistique historique, il fera logiquement du langage – et plus précisément de celui des Elfes – la première pierre de son édifice. Le reste, c’est-à-dire l’univers, sera construit autour afin de donner une cohérence à l’ensemble.

L’effet sur moi a été immédiat, j’ai tout de suite eu envie de relire – je l’avais déjà lu enfant, donc il y a fort longtemps – Bilbo le Hobbit, Le Hobbit étant le titre de la nouvelle traduction – je ne débattrai pas de l’influence de la sortie du film de Peter Jackson qui est peut-être à l’origine de toute cette chaîne d’évènements. La lecture du dossier m’a permis de considérer le livre sous un angle plus ouvert que celui d’une publication destinée à la jeunesse. Bien m’en a pris car je me suis régalé. Dès l’ouverture de la porte ronde de celui qui deviendra notre héros le charme opère.

Il avait une porte tout à fait ronde comme un hublot, peinte en vert, avec un bouton de cuivre jaune bien brillant, exactement au centre. Cette porte ouvrait sur un vestibule en forme de tube, comme un tunnel : un tunnel très confortable, sans fumée, aux murs lambrissés, au sol dallé et garni de tapis ; il était meublé de chaises cirées et de quantité de patères pour les chapeaux et les manteaux – le hobbit aimait les visites.

On entre et on se sent tout de suite bien dans cet univers à l’ambiance si chaleureuse. Mais le repos sera de courte durée et nous allons vite quitter ce refuge douillet pour la grande aventure sous l’injonction du grand magicien Gandalf et d’une envahissante tribu de Nains. Nous allons alors vivre ce qui peut-être considéré comme l’archétype d’une quête, celle d’un trésor enfoui sous la montagne et gardée par le terrible dragon Smaug – les dragons adorent les trésors et ont l’habitude de dormir dessus, ce qui est assez embêtant lorsque l’on souhaite s’en emparer. Linéaire mais rythmée, elle va être l’occasion de visiter le monde et de croiser la plupart de ses habitants dont les Elfes, les Gobelin et les Trolls – rassurez-vous il y en a bien d’autres.

Le Hobbit est le premier livre publié par Tolkien (1937). Moins sombre et moins fouillé que Le Seigneur des anneaux il conviendra mieux à un jeune public mais n’en demeure pas moins intéressant pour un public adulte. Il constitue un très bon divertissement et une indispensable introduction à son plus dense et plus noir – et plus long, bien plus long – successeur. Après tout, n’oublions pas que c’est ici que Bilbo croisera, pour la première fois, le chemin de l’anneau.

Outre le dictionnaire dont j’ai déjà parlé, je signale la sortie – opportuniste ? – d’une nouvelle traduction 2 de Daniel Lauzon et d’une version annotée, intitulée tout simplement Le Hobbit annoté3, tous deux parus aux éditions Christian Bourgois.


J. R. R. Tolkien, Bilbo le Hobbit, Le Livre de Poche, coll. « Fantasy », 2007, 371 p, Amazon.


  1. Vincent Ferré, Dictionnaire Tolkien, Cnrs Editions, 2012, 700 p, Amazon↩︎

  2. J. R. R. Tolkien, Le Hobbit, traduit par Daniel Lauzon, Christian Bourgois, 2012, 301 p, Amazon↩︎

  3. J. R. R Tolkien, Le Hobbit annoté, traduit par Daniel Lauzon, Édition : édition revue et augmentée., Christian Bourgois, 2012, 468 p, Amazon↩︎