James Ellroy se met dans la peau d’un tueur en série et nous raconte son histoire. Ce livre est le récit réalisé par un tueur de son épopée sanglante. La narration est donc à la première personne. Elle est ponctuée par des extraits de journaux, de rapports de police et du journal d’un enquêteur. Pour un livre de James Ellroy, il est très accessible car il y a peu de personnages – il croisera tout de même la route d’une célébrité plutôt flippante elle aussi : Charles Manson – , ou en tout cas ils ne sont pas présents très longtemps … Le tueur est un personnage complexe à la fois très intelligent et extrêmement violent. Il est imprévisible et souffre, en plus d’une enfance très difficile, de graves troubles psychologiques (schizophrénie).

Le travail d’Ellroy est fascinant, on a du mal à comprendre comment il a réussi le tour de force de se mettre, de manière aussi crédible, dans la tête d’un tueur en série. Le résultat est bluffant et glaçant. L’article Wikipédia consacré à l’auteur révèle que ce roman est utilisé comme référence dans les écoles de formation de policiers, c’est dire s’il est crédible. Difficile de laisser tomber le livre, pas par empathie pour le tueur, mais parce que l’on a tout simplement envie de connaître la suite. James Ellroy fait également très bien son boulot car les éléments externes à la confession (articles et autres documents) viennent entretenir le suspense en anticipant ou en revenant sur certains passages de la terrible équipée. Ces éléments contribuent largement à l’attrait assez malsain qu’exerce le livre.

N’étant pas spécialiste du sujet, je ne peux pas dire si le résultat est réaliste, mais en tout cas ce récit m’a bien plus impressionné que certains – et trop nombreux – films ou livres exploitant le filon des tueurs en série. Le seul qui, à mon avis et à ma connaissance, puisse tenir la comparaison est le American Psycho1 de Bret Easton Ellis. Les deux ouvrages sont aussi crus (aucun détail n’est épargné au lecteur) et dérangeants. En conclusion, un livre passionnant à ne cependant pas mettre entre toutes les mains.


James Ellroy, Un tueur sur la route, traduit par Freddy Michalski, Rivages, coll. “Rivages/Noir”, 1991, 352 p, Amazon.


  1. Bret Easton Ellis, American Psycho, traduit par Alain Defossé, 10/18, coll. « Domaine étranger », 2005, 526 p, Amazon↩︎