Il y a tellement de choses à dire que je ne sais pas par où commencer. Peut-être par le commencement. Lorsque j’ai découvert ce livre sa couverture sombre a fait ressurgir dans ma mémoire des souvenirs de lecture de l’un de ses nobles prédécesseurs dans la belle collection “Grafica” de la maison Glénat : Le Troisième Testament1. Et tout de suite après, j’ai pensé à l’intégrale d’Elric2, parue chez Omnibus, qui prends la poussière depuis quelques années dans ma bibliothèque – à ce propos, pour accompagner la sortie de la bande dessinée, les éditions Pocket rééditent le cycle d’Elric en trois intégrales 3. J’allais donc joindre l’utile à l’agréable en découvrant cet univers qui me tends les bras depuis trop longtemps par la belle porte d’entrée que constitue cette BD. Pour les amateurs de fantasy, c’est une lapalissade que de dire que le personnage d’Elric existe depuis bien longtemps (1945) sous la plume de l’un des plus grands auteurs du genre : Michael Moorcock. Il a créé son héros comme un anti Conan le Barbare. Né albinos et malade, Elric est également tourmenté moralement. On imagine alors très bien comment des générations d’adolescents – ce n’est pas péjoratif – férus de fantasy ont pu s’identifier à ce héros torturé.

De tous ceux de ma race, le Destin a voulu que je sois le plus grand et le plus faible à la fois … Et m’a mis sur le trône pour que tous voient combien il s’était joué de moi …

Il faut tout de suite dire que le scénariste et les trois dessinateurs ont rendu avec ce travail un bel hommage au démon blanc. Oui vous avez bien lu, trois dessinateurs ont travaillé de conserve pour donner vie à cette bande dessinée. Chose assez rare dans le monde de la bande dessinée franco-belge, il faut souligner la pertinence de ce travail à six mains qui donne l’illusion qu’un seul dessinateur génial est à l’origine de ce magnifique résultat. N’oublions pas le travail du scénariste qui ne s’est pas contenté de retranscrire tel ou tel épisode de l’oeuvre de Moorcock, mais qui a puisé dans ce grand réservoir la matière pour construire son scénario et offrir une entrée en matière claire et fluide. Je pense l’avoir dit plusieurs fois, mais je trouve que la fantasy se prête particulièrement bien à la BD. Le dessin permet d’exploiter pleinement la richesse de ces univers afin, comme c’est le cas ici, d’en mettre plein les yeux au lecteur.

Avide d’en découvrir toujours plus sur cet univers et ces personnages, j’ai dévoré cette BD et, c’est avec une légère déception, que j’ai découvert que les dernières pages n’étaient pas consacrées à la suite de l’histoire mais à un – très beau et intéressant néanmoins – cahier graphique. Mais réjouissons-nous car ce volume est le premier des quatre tomes qui formeront le premier cycle (Melniboné) de la série. Nous avons donc de bons moments à venir. Nos petits français ont été à la hauteur du monument anglais auquel ils ont eu l’audace de s’attaquer, Cocorico ! Devant cette insolente réussite, je ne peux que citer Goethe “Quoique vous puissiez rêver de faire, mettez-le en oeuvre. L’audace comporte du génie, du pouvoir et de la magie. Commencez dès maintenant !”

Je remercie les éditions Glénat ainsi que Babelio de m’avoir fait parvenir ce livre dans le cadre du programme Masse critique.


Julien Blondel, Michael Moorcock, Didier Poli, Robin Recht et Jean Bastide, Elric tome 1 : Le trône de rubis, Glénat, coll. « Grafica », 2013, 64 p, Amazon.


  1. Alex Alice et Xavier Dorison, Le Troisième Testament, tome 1 : Marc ou le réveil du lion, Glénat, coll. « Grafica », 1997, 48 p, Amazon↩︎

  2. Michael Moorcock, Le cycle d’Elric, Omnibus, 2006, 1218 p, Amazon↩︎

  3. Michael Moorcock, Elric : Intégrale : Tome 1, Pocket, 2013, 600 p, Amazon↩︎