Jeffrey Lionel Dahmer (né le 21 mai 1960 à Milwaukee – 28 novembre 1994 à Portage), surnommé “le cannibale de Milwaukee”, est un tueur en série américain qui a avoué avoir assassiné dix-sept jeunes hommes entre 1978 et 1991 (seize de ces meurtres ayant eu lieu entre 1987 et 1991). Ces meurtres comportaient des viols, des démembrements, de la nécrophilie et du cannibalisme.1

Eh bien, avant tout cela, Jeffrey Dahmer fut un lycéen et Derk Backderf était dans sa classe. Ils étaient aussi voisin dans la petit ville de Bath et même un peu amis – on peut dire ça. Mais, vous vous en doutez, Dahmer n’était déjà pas tout à fait comme les autres.

Derk Backderf revient donc sur sa jeunesse comme pour réexaminer les faits, pour se poser des questions, suite à la formidable claque reçue lorsqu’il a appris les crimes commis par son ancien camarade. Comment Dahmer en est-il arrivé là ? Retrospectivement, comment était-il à cet époque ? Quand a-t-il entamé sa descente aux enfers ? Quelles en sont les causes ? Qu’aurait-il été possible de faire pour éviter ce désastre ?

Ce livre donne quelques clés et permet de cerner la personnalité du jeune Dahmer. Du gars bizarre – tout le monde a le souvenir d’avoir croisé d’étranges personnages au lycée – que l’on prend pour une mascotte à celui qui boit de l’alcool dès le matin, la ligne rouge est vite franchie. L’atmosphère est profondément dérangeante, déprimante et les dessins qui rappellent le style de Crumb, n’arrangent rien. En revoyant les faits, Derk Backderf s’interroge sur un point important, il l’exprime à plusieurs reprises dans son récit et le souligne dans son introduction.

J’ai tendance à croire que Dahmer n’aurait pas fini en monstre, que tous ces gens ne seraient pas morts dans des conditions aussi atroces si seulement les adultes autour de lui n’avaient pas été aussi indifférents et aussi étrangers à son cas – et c’est inexplicable, impardonnable et incompréhensible.

Un témoignage très bien documenté pour qui s’intéresse aux tueurs en série – la notice en fin de livre détaille les sources et le pourquoi de chaque scène. Ce livre est l’occasion d’aborder le sujet sous un angle différent. Pour une fois ce n’est pas le modus operandi qui est le sujet, ce n’est pas l’horreur des crimes qui est surexposée – pourtant il y aurait eu de la matière –, c’est la genèse: ce qu’il a vécu, ce qu’il a fait, qui il était avant de passer à l’acte pour la première fois et de s’enfoncer inexorablement dans l’horreur.


Derf Backderf, Mon ami Dahmer, Cà et Là, 2013, 222 p, Amazon.