L'Art invisible
En bande dessinée, lorsque le dessinateur et le scénariste ont bien fait leur travail, paradoxalement ça ne se voit pas. Dans ce cas, on ne remarque pas une admirable transition ou des dimensions de cases particulièrement appropriées. Ce que le lecteur ressent reste au niveau de l’expérience de lecture, il va parler d’un rythme, d’une impression de fluidité. Bref on apprécie le résultat, l’effet produit et non les ficelles qui ont permis cette prouesse. C’est à cet endroit précis que réside l’art invisible et c’est tout le propos de Scott McCloud de nous montrer combien cet art, ce fameux 9ème art, est magique. Pour cela, il part de très loin en remontant le temps à la recherche des premières traces “d’art séquentiel” mais aussi et surtout à la source des processus complexes (cognitifs) mis en oeuvre par notre cerveau pour que la magie opère. Il insiste sur l’importance des blancs entre les cases — qui les avait remarqué —, ils permettent au lecteur d’imaginer ce qui s’est passé entre les deux cases, de faire lui-même la transition, de laisser libre cours à son imagination. Ce que je dis là est extrêmement réducteur par rapport à la justesse, à la pertinence et à la richesse de ce livre. ...