Je dois être le dernier arriéré à ne pas avoir vu tous les épisodes de Game of Thrones. Pour ne pas faire comme tout le monde, j’ai plutôt décidé de lire les livres – et le défis est de taille. Même s’il paraît qu’ils ont fait du très bon travail sur cette série télé, je n’apprécie pas toujours le travail des scénaristes qui adaptent tout en puisant dans l’oeuvre originale la matière nécessaire pour répondre au cahier des charges de toute série à succès dont les deux piliers sont le sexe et la violence. Côté violence il y a l’embarras du choix, côté sexe un peu moins, mais il y a tout de même quelques filons à exploiter.

J’arrête mes sarcasmes pour revenir au livre. J’avais plutôt un à priori négatif après que tout le monde m’a bassiné avec cette série. J’ai commencé la lecture avec un oeil critique, bien décidé à démonter ce texte unanimement encensé. Je ne vais pas être mesquin et trop charger le traducteur, mais je trouve que de ce côté là le travail n’est pas irréprochable, loin de là. Je serais bien étonné que les Stark aient trouvé des loups-garous dès le début du livre. Recherches faites, la version originale parle de dire wolf qui est une ancienne espèce de loup dont le nom scientifique est Canis dirus – ce n’était pas top comme traduction, mais au moins elle aurait été plus fidèle au terme employé par l’auteur. Pour le reste, il n’y a pas grand chose à dire. Le texte est étonnamment prenant pour peu que l’on ne se perde pas au début dans le flot des personnages. Je pense qu’il faut accepter d’être un peu largué. Pas d’inquiétude, on arrive petit à petit à raccrocher les wagons. Lorsque l’on commence à s’y retrouver un peu, l’expérience est très convaincante. À la moitié du livre on est parvenu à construire une carte mentale de l’univers et des forces en présence.

Enfin de la fantasy pour adultes, trahisons et complots sont au programme. Je ne suis pas un grand fan des narrations aux multiples point de vue car je les trouve artificielles, mais il faut bien avouer qu’ici ça fonctionne tant le champ de l’intrigue est vaste. Voici ce que je disais à propos du livre Les Annales de la Compagnie noire.

Elle évolue dans un univers fantastique assez discret. J’entends par là que l’univers et les descriptions afférentes ne sont pas prépondérants par rapport à l’histoire. C’est souvent l’un des travers du genre. On s’ennuie parfois profondément à la lecture d’interminables descriptions. Si vous cherchez du rêve, des mondes merveilleux, des créatures étranges, des quêtes héroïques, passez votre chemin. Ici, ce qui domine c’est la stratégie, la politique, la guerre, le pouvoir et les intrigues.

Tout ceci est vrai dans le Trône de fer. Ces deux oeuvres sont donc comparables sur le fond et même un peu sur la forme puisque les systèmes narratifs sont bien codifiés dans les deux cas bien que ce soit d’une façon très différente. Pourtant, au niveau de l’efficacité, du plaisir de lecture, elle sont incomparables. Le Trône de fer surclasse largement La Compagnie noire. L’intrigue a bien plus d’intérêt sans compter l’ambition du projet. L’histoire du Trône de fer se déroule dans plusieurs dimensions à la fois:

  • Personnages,
  • Lieux géographiques,
  • Temps (même si ce n’est pas omniprésent, il est souvent fait référence au passé).

Parmi les sources d’inspiration avouées par l’auteur de Game of Thrones, George R. R. Martin, figure une série de romans d’origine française : Les Rois maudits de Maurice Druon. Ce nom raisonne à l’oreille de nombreuses personnes puisque ces romans parus de 1955 à 1977 avaient été adaptés en série télé à partir de 1972 – déjà les séries. Ce n’est peut être pas un hasard si le premier tome de la série de Martin se nomme Le Trône de fer un nom qui fait écho au premier roman de la série de Druon qui porte le titre Le Roi de fer1. Rien ne se créé, tout se transforme.

Toujours dans le domaine des références, ce que vit Jon me fait beaucoup penser à un autre livre que j’avais beaucoup aimé – et qui a été depuis adapté au cinéma – La Stratégie Ender2. Ce n’est pas du tout le même univers, mais le récit de l’apprentissage et les relations avec les autres élèves m’ont rappelé ce très bon souvenir de lecture. J’arrête de parler, si vous cherchez un bon livre de fantasy, allez-y.


George R. R. Martin, Le trône de fer, traduit par Jean Sola, J’ai Lu, coll. « Fantasy », 2001, 477 p, Amazon.


  1. Maurice Druon, Les Rois maudits, #1 : Le Roi de fer, Le Livre de Poche, 1973, Amazon↩︎

  2. Scott Card Orson, Le Cycle d’Ender, #1 : La Stratégie Ender, J’ai lu, 2001, Amazon↩︎