Et si le 7 mai 2017, d’une poignée de voix, Marine Le Pen était élue présidente de la République ?

La Présidente est de circonstance. Ecrit en 2015, son actualité est brulante. Si François Durpaire avait imaginé une revanche Hollande / Sarkozy – qui pourrait lui en vouloir – le risque et sa probabilité restent les mêmes. Pour réaliser ce document de politique fiction – le terme d’uchronie apparaît à raison dans son avant-propos – l’auteur, lui-même universitaire et historien, s’est entouré de plusieurs spécialistes (Emmanuel Lechypre, Thomas Legrand, Ulysse Gosset et Wallès Kotra) dans les différents domaines abordés. Tout ceci légitime le sérieux de ce document qui ne se veux pas n’être qu’un épouvantail agité devant les yeux du lecteur, mais une tentative d’analyse de ce que serait les 100 premiers jours au pouvoir de Marine Le Pen – tout est possible Trump a bien été élu. Espérons que ce qui n’est au jour où j’écris ces lignes qu’une fiction ne deviendra jamais réalité – j’ai encore espoir, la bibliothécaire m’a regardé d’un drôle d’air lorsque je l’ai emprunté.

Après l’avoir terminé, je dois avouer que je suis malgré tout un peu déçu, certainement à la hauteur de mon enthousiasme. D’abord car il faut lire la suite, elle se termine sur un cliffhanger grossier qui laisse le lecteur comme moi pris au dépourvu, avec trois tomes au compteur la série est encore en cours – il est trop tard pour que je lise la suite, je vais attendre de voir ce qu’il se passe dans la réalité. Ensuite parce que ce n’est pas non plus sensationnel, il faut être honnête. L’histoire d’amour avec une étrangère – dont il ne faut pas être devin pour comprendre ce qui va lui arriver – en parallèle de la politique est très convenue pour ne pas dire plus. Les seuls vrais point forts se trouvent dans le dessin, la mise en page et les dialogues. Tout à ce niveau sonne vrai, le dessin est à la fois photo réaliste et à la fois très dessiné – quelle formule, je suis de plus en plus précis dans mes analyses –, mais les attitudes et les paroles des personnages sonnent vrai. Farid Boudjellal est parvenu à capter l’essence de chaque personnage qu’il soit principal ou secondaire. Le fait de faire intervenir les vrais journalistes avec leur nom et leurs traits de caractère est vraiment une bonne idée et renforce la crédibilité de la BD – l’auteur lui-même apparaît, c’est celui avec la coiffure de Coolio. Si vous aimez les BD évoquant la vie politique, je vous conseille sans modération Quai d’Orsay et Le Château. Si vous souhaitez avoir une autre vision de ce que pourrait être une autre fin de l’alternance Gauche / Droite, lisez Soumission de Michel Houellebecq.


François Durpaire et Farid Boudjellal, La Présidente, Les Arènes, 2015, 158 p, Amazon.