Lunar Park

Il était question d’autofiction dans Yoga d’Emmanuel Carrère, mais c’était vraiment de la rigolade à côté de Lunar Park. Un personnage principal qui est l’auteur, notamment, de Moins que zéro, son premier roman, mais aussi et surtout de celui qui a grandement participé à bâtir sa réputation et son succès, le terrible American Psycho1. Bret Easton Ellis débute d’ailleurs son roman en reprenant les premières phrases de tous ses romans pour bien encrer son personnage dans la réalité. Ensuite, il fait intervenir son compère Jay McInerney – cette apparition pas très flatteuse a d’ailleurs été à l’origine d’une brouille entre les deux auteurs et amis. Puis il y a la fiction, ce Bret Easton Ellis là est hétéro – enfin, la plupart du temps – et est en couple avec une actrice, Jayne Dennis qui n’existe pas dans la réalité. Bref, le contexte est posé, il va jouer avec le lecteur tout au long de ce livre, et ce dernier ferait bien de connaître son oeuvre s’il ne veut pas passer à côté car les références sont nombreuses, notamment dans le choix des personnages, à tel point que l’on peut parler je pense – en fait je ne maîtrise pas complètement le concept – d’intertextualité. ...

La promesse de l’aube

De ma lecture de La promesse de l’aube cet été, j’ai retenu quelques citations et une impression mitigée qui m’a rendu la tâche d’écrire sur ce livre très difficile. J’ai trouvé qu’il oscillait en permanence — et ce dès le début et jusqu’à la fin – entre l’émotion et le burlesque d’une façon assez déstabilisante. Romain Gary est un mystificateur génial, il l’a prouvé de façon magistrale avec son double Goncourt – performance inégalée et inégalable. Cette facette est très bien illustrée dans ce livre dans lequel il fait passer le lecteur du rire aux larmes jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il s’est fait avoir. Oui car ce livre est un roman, mais le roman de sa vie. ...

Mémoires d'un jeune homme dérangé

Voici le premier roman de Frédéric Beigbeder. On peut dire sans trop se tromper qu’il s’agit d’une autofiction. Ce monsieur Marronnier ressemble furieusement à notre écrivain. D’abord sur le plan physique: “À vrai dire, ce menton très proéminent ne possède aucune utilité.” Mais aussi sur le plan social et moral. Le personnage est un jeune homme aisé de bonne famille qui passe son temps à sortir et en tire quelques profits en rédigeant des chroniques mondaines : “Mon élitisme restait l’éthylisme.” Ce livre raconte cette vie faite de fêtes, de copains (les ricaneurs pantalonnés ou les hooligans cravatés) et enfin d’amour. ...

Une forme de vie

Dans l’armée, le taux d’obésité a doublé depuis 2003, selon des études du Pentagone. – LCI C’est peut-être en tombant stupéfaite devant ce type de phrase que l’idée de son nouveau livre a germé dans l’esprit d’Amélie Nothomb. Cette affirmation est surprenante pour tout un chacun - les militaires véhiculent une image de muscles et de rigidité bien loin de l’obésité - mais elle doit l’être encore plus pour la romancière belge qui a un passé commun avec les problèmes de poids. D’abord l’anorexie dont elle a été victime racontée dans Biographie de la faim puis l’obésité évoquée au travers du personnage de Prétextat Tach dans Hygiène de l’assassin. Pour traiter ce sujet elle a choisi le genre épistolaire. Elle imagine donc un dialogue, par courrier interposé, entre un soldat Américain mobilisé en Irak et elle même. Si les situations et les dialogues sont complètements fictifs, les positions et les réflexions d’Amélie Nothomb, semblent bien réelles. C’est donc d’une autofiction qu’il s’agit. C’est un genre intéressant dans lequel l’auteur peut évaluer ses propres réactions face à un univers et des situations fictives, les exemples récents d’autofiction qui me viennent à l’esprit sont le très bon Trois jours chez ma mère de François Weyergans et le moins bon Lunar Park de Bret Easton Ellis. ...