Ancien élève de l’ENA, il a occupé plusieurs postes dans l’administration en tant que haut fonctionnaire – il travailla notamment pour la Nouvelle-Calédonie – avant de se consacrer à l’écriture et de rencontrer le succès avec son premier roman Ce qu’il advint du sauvage blanc. Cette reconnaissance est méritée tant le livre est bien réalisé. Il est construit sur deux plans temporels exploités dans un ordre chronologique. Dans le premier on suit les aventures du matelot Narcisse Pelletier depuis son abandon sur une île proche de l’Australie par le bateau sur lequel il officiait. Dans le second on s’intéresse, des années plus tard (18 ans), à la découverte d’un homme blanc entièrement tatoué vivant parmi ceux que l’on appelait alors les “sauvages”, c’est-à-dire les aborigènes d’Australie. Celui-ci incapable de parler sera baptisé “le sauvage blanc”. L’un raconte comment quitter la civilisation, l’autre comment y retourner.

Les deux récits s’entrecroisent. Le premier utilise une narration classique, le second une forme épistolaire via les courriers adressés au Président de la Société de Géographie de Paris par le jeune Octave de Vallombrun qui a été chargé de recueillir et de prendre soin du “sauvage”. Cette deuxième partie ressemble à une enquête. Pendant que le lecteur découvre ce qu’il est arrivé à cet homme, Octave cherche à reconstruire son histoire.

La forme de cette deuxième partie est un exercice périlleux car adopter la forme épistolaire implique d’employer le langage et les usages de l’époque (fin XIXe). François Garde s’en tire avec les honneurs. C’est à ce genre de prouesse que l’on reconnaît un auteur capable de trouver le ton juste pour que ça sonne vrai.

Les conseils que vous souhaiteriez me donner seront pour moi des oracles auxquels j’obéirai religieusement. En attendant, je veux consigner tout ce que je constate, laissant à de plus savants que moi le soin de trier le bon grain de l’ivraie.

En lisant ce livre, on ne peut pas s’empêcher de penser à ses illustres ancêtres Robinson Crusoé, le plus récent Vendredi ou la vie sauvage ou plus généralement au mythe du bon sauvage. A partir de cette histoire vraie, François Garde a construit un très beau livre à la fois prenant et riche d’enseignement.


François Garde, Ce qu’il advint du sauvage blanc, Gallimard, coll. « Folio », 2012, 336 p, Amazon.