Malgré un intérêt soutenu porté à la bande dessinée depuis une quinzaine d’années, je dois encore une fois constater – et bien avouer – mon ignorance. Je n’avais encore rien lu de l’illustrateur et dessinateur de BD de premier plan Jean-Claude Floch, dit Floc’h et de son compère scénariste Jean-Luc Fromental.

A la bibliothèque, je suis tombé par hasard sur Jamais deux sans trois. J’ai pris une claque en feuilletant les pages de cet album. La ligne claire est élevée au rang d’oeuvre d’art. Les dessins sont somptueux, le style d’un classicisme absolu ajoute encore une touche de raffinement au graphisme de cet album qui en fait un objet intemporel, un classique instantané.

Le classicisme des dessins renvoie à celui du scénario qui rejoue un grand classique – inspiré de la pièce Betrayal (Trahisons) du dramaturge Harold Pinter –, celui du triangle amoureux. Les personnages sont les plus grands représentants du genre: le richissime mari trompé, la belle et enfin l’amant pilote de course. Ici, même quand ça tourne mal, pas d’empoignade, de cris ou de pleurs. Ce type de mésaventure s’appréhende avec classe – rien de bien étonnant pour Floc’h le dandy. C’est un très grand styliste, voici un extrait d’une interview dans laquelle il évoque ce penchant.

Je donne raison à Tom Wolfe qui dit qu’en vieillissant, il vaut mieux porter une veste et une cravate parce que l’on est moins ridicule. Il faut, je crois, ne pas se laisser aller. Borges disait : “S’il fait froid, que l’on est bien rasé et que la cravate est bien nouée, on mérite d’être intelligent. On peut même affronter la journée.” […] Tout ce que je déteste sont ces adultes qui s’habillent comme des enfants avec un T-shirt, un pantalon au-dessous du genou et des grosses baskets.1

Moins conquis par le scénario que par les dessins, j’ai tout de même passé un très bon moment. Le travail graphique justifie à lui seul la lecture de cette BD. Depuis – cet article date un peu – j’ai offert en cadeau un très beau livre, une rétrospective du travail de Floc’h Floc’h, inventaire2. Je le conseille également à tous ceux qui, comme moi, sont absolument fans de ses dessins – d’ailleurs j’essaierai d’en parler dans un prochaine article.


Floc’h et Jean-Luc Fromental, Jamais deux sans trois, Dargaud, 2016, 76 p, Amazon.


  1. Floc’h : “Le style, c’est une manière de tenir debout”, entretien avec Joseph Ghosn. ↩︎

  2. Floc’h et Jean-Luc Fromental, Floc’h, inventaire, La Martinière, 2013, 220 p, Amazon↩︎