Je n’avais jamais lu Howard Phillips Lovecraft pourtant je m’intéresse à cet auteur si particulier car il a inspiré un pan entier de cette branche de la science-fiction ou de la fantasy tournée vers l’horreur qu’il a certainement contribué à créer. Parmi une oeuvre foisonnante – je ne parle pas de sa correspondance qui est colossale –, j’ai pris conseil auprès de Michel Houellebecq qui lui a consacré un essai il y a une vingtaine d’années H.P. Lovecraft, Contre le monde, contre la vie et j’ai donc choisi l’un des deux recueils portant le nom d’une de ses nouvelles, La couleur tombée du ciel. Le reclus de Providence comme il est parfois surnommé – alors qu’il n’était pas reclus, mais souffrait plutôt d’un manque d’argent – utilise dans ses livres les deux piliers scientifiques et mythologiques – il a créé sa propre mythologie – pour instiller chez son lecteur un fort sentiment d’horreur – de la peur, du frisson, je ne sais pas trop comment le dire. L’effet recherché est mis en exergue par une certaine normalité du narrateur – le lecteur peut s’identifier aisément à lui et sa présence ancre le récit dans la réalité – et par une narration particulièrement travaillée.

Je regagnai en hâte mon hôtel avant le coucher du soleil, pour ne pas voir surgir les étoiles au-dessus de moi en terrain découvert ; et je rentrai le lendemain à Boston pour donner ma démission. Je n’aurais pas pu entrer de nouveau dans le chaos obscur de cette vieille forêt abrupte, ni affronter une fois de plus cette grise lande foudroyée où béaient les profondeurs du puits noir près des briques et des pierres écroulées.

Comment après avoir lu ce passage ne pas poursuivre la lecture ? On remarque également la profusion d’adjectifs issus du registre de l’horreur qui viennent fortement teinter le récit. Alors j’aurais dû adorer, mais malheureusement ce genre de l’horreur n’est décidément pas ma tasse de thé. La deuxième raison qui est personnelle et purement subjective est que je n’apprécie en général pas beaucoup le format court de la nouvelle. Sachant cela, j’ai du mal à enchaîner les histoires bien qu’elles soient prenantes, inventives – c’est le moins que l’on puisse dire – et particulièrement bien réalisées et maîtrisées. Une chose que j’aime beaucoup par contre est l’univers mythologique et ésotérique dont de nombreux auteurs se sont inspirés. Pour rester dans le thème je vais donc me tourner vers le premier tome d’Hellboy, Les germes de la destruction dont l’univers est purement du Lovecraft, mais avec une dose de comics et aussi quelques nazis et le mystique Raspoutine – quel programme. Pour terminer voici une citation typiquement lovecraftienne.

Ce n’était qu’une couleur tombée de l’espace – un messager terrifiant des empires incréés de l’infini au-delà de tout ce que nous connaissons de la Nature [il y a bien une majuscule dans le texte] ; d’empires dont la seule existence accable l’intelligence et nous laisse paralysés devant les noirs abîmes extra-cosmiques qu’elle ouvre à nos yeux affolés.


Lovecraft, Howard Phillips. La Couleur tombée du ciel. Gallimard, 2000.