Mégafauna

Le monde est peuplé de deux espèces humaines, séparées par une immense muraille, bâtie siècle après siècle. En tout cas le début de cette uchronie qui imagine que les néandertaliens – vous savez ceux avec les arcades sourcilières prononcées – auraient survécu au terrible sapiens – vous savez ceux qui sont en train de détruire la planète – donne envie. L’idée de Nicolas Puzenat est bonne et très bien exploitée. La BD mêle aventure, politique et réflexions ethnologiques. Lorsque l’on voit la difficulté à vivre dans ce monde qui ne compte qu’une seule espèce du genre Homo, comment imaginer raisonnablement s’entendre avec une autre espèce ? Il s’agit d’un one-shot assez généreux (près du centaine de pages) au dessin classique, parfois maladroit sur certains visages, mais plutôt très agréable dans l’ensemble. Quelques trouvailles comme les couvre-chefs des néandertaliens apportent une touche d’originalité qui fait la différence. Une lecture à conseiller sans réserve. Le titre m’a intrigué jusqu’à ce que je cherche la définition. Il caractérise les grands animaux comme les éléphants ou les mammouths… ...

1 févr. 2022 ·  BD

La Présidente T1

Et si le 7 mai 2017, d’une poignée de voix, Marine Le Pen était élue présidente de la République ? La Présidente est de circonstance. Ecrit en 2015, son actualité est brulante. Si François Durpaire avait imaginé une revanche Hollande / Sarkozy – qui pourrait lui en vouloir – le risque et sa probabilité restent les mêmes. Pour réaliser ce document de politique fiction – le terme d’uchronie apparaît à raison dans son avant-propos – l’auteur, lui-même universitaire et historien, s’est entouré de plusieurs spécialistes (Emmanuel Lechypre, Thomas Legrand, Ulysse Gosset et Wallès Kotra) dans les différents domaines abordés. Tout ceci légitime le sérieux de ce document qui ne se veux pas n’être qu’un épouvantail agité devant les yeux du lecteur, mais une tentative d’analyse de ce que serait les 100 premiers jours au pouvoir de Marine Le Pen – tout est possible Trump a bien été élu. Espérons que ce qui n’est au jour où j’écris ces lignes qu’une fiction ne deviendra jamais réalité – j’ai encore espoir, la bibliothécaire m’a regardé d’un drôle d’air lorsque je l’ai emprunté. ...

1 mai 2017 ·  BD

Le Détroit de Behring

Avant toute chose, il convient de s’arrêter sur le titre de ce livre. Si le sous-titre, Introduction à l’uchronie, ne souffre aucune ambiguïté, ce n’est pas le cas du titre. Il est bien plus original et, nous allons le voir, particulièrement bien trouvé. La première réaction est de se dire, quel est le rapport ? Emmanuel Carrère n’est pas homme à négliger son lecteur et lui fournit une explication à la fin de son ouvrage. ...

Le club des policiers yiddish

On plonge dans ce roman de Michael Chabon comme dans les eaux glacées de l’Alaska. Les premiers moments sont douloureux et l’on ressent d’emblée un profond étourdissement. On est submergé par les dialogues colorés truffés d’expressions yiddish – à tel point que le livre dispose d’un glossaire. On ne sait pas trop où l’auteur veut en venir puis, aux détours de ses circonlocutions, commence à émerger la trame de l’histoire. ...

Superman Red Son

Mark Millar (scénariste de comics ayant notamment travaillé sur The Authority et sur certains Ultimates) est à la baguette pour piloter cette épisode de la série des “Elseworlds”. Entendez par là histoires alternatives. Nous sommes donc bien dans une série d’uchronies proposée par DC Comics. L’univers de DC contient la matière nécessaire à la construction d’histoires alternatives. En tout premier lieu, les nombreux personnages, pour certains vieux de plus de 50 ans qui incarnent des valeurs dans l’imaginaire public. Par exemple, l’antagonisme entre la lumière et la pénombre incarné par la lutte perpétuelle entre Superman et Batman. Ici, c’est justement au plus ancien des héros DC que s’intéresse Mark Millar, à savoir Superman. Il imagine que le jeune Kal-El (nom kryptonien de Superman) n’a pas atterri dans le Kansas aux Etats-Unis mais en plein kolkhoze Ukrainien. Si le changement est infime – il aurait suffit d’un décalage de 12 h de son décollage depuis Krypton –, les conséquence sont colossales. N’oublions pas qu’à cette époque nous sommes en plein communisme en URSS sous le commandement du petit père des peuples. Ce dernier ne manquera pas de s’intéresser au jeune prodige extra-terrestre qui ne tardera pas à arborer la faucille et le marteau sur son poitrail en lieu et place du fameux S. ...

12 janv. 2010 ·  BD

La part de l'autre

Comment imaginer que même le pire tyran aurait pu être un autre ? Emettre l’hypothèse que l’Homme n’est pas intrinsèquement mauvais, que c’est la vie qui le transforme. C’est le pari risqué que tente ici Eric-Emmanuel Schmitt en s’attaquant au chef de file des nazis. Pour démontrer sa thèse, il utilise un genre particulier d’uchronie. Dans ce roman, la séparation entre les deux Histoires a lieu au cours du récit. Afin de mettre en perspective les deux univers résultants – la réalité historique et la fiction –, l’auteur nous propose de suivre en parallèle le parcours d’Adolphe et d’Hitler. De ce fait, tout en revivant les horribles évènements de l’Histoire aux côtés d’Hitler, nous observons les choix de son double fictionnel Adolphe. ...

La véritable histoire du dernier roi socialiste

Malgré ce que laisse entendre son titre, ce livre appartient à un genre très particulier de la science-fiction: l’uchronie. Ce thème littéraire consiste à créer un point de divergence dans l’Histoire donnant ainsi naissance à une Histoire alternative, différente de celle que l’on est censé avoir apprise à l’école. Cette parfaite illustration de l’effet papillon est intéressante à plus d’un titre: Elle compte souvent, parmi ses protagonistes, des personnages historiques. On retrouvera par exemple Churchill et bien d’autres dans ce roman. Elle nous donne à réfléchir à l’importance des détails, à nous faire prendre conscience que le destin du monde aurait pu être différent. Arrêtons là les digressions et revenons à ce roman qui invente un autre dénouement aux révolutions de 1848 plus connues sous le nom de Printemps des peuples. Roy Lewis imagine qu’elles ont engendré un monde socialiste – ou communiste – se trouvant donc aux antipodes de notre monde hyper capitaliste dirigé par la Bourse. L’auteur nous invite à nous interroger sur la viabilité d’une telle organisation et nous donne l’occasion de remettre en cause un schéma que nous pensions incontournable. L’auteur du désormais célèbre Pourquoi j’ai mangé mon père1, d’origine anglaise, nous relate les faits avec sa vision d’outre-manche. Pour ceux d’entre nous qui ne connaissent pas bien l’histoire de ce pays – c’est mon cas –, cette position aura l’inconvénient de minimiser l’impact du récit et de perdre quelque peu le néophyte. Néanmoins, c’est un mal pour un bien car les plus motivés se documenteront sur Churchill : ...