L'Aliéniste

L’aliéniste emprunte beaucoup à Sherlock Holmes à commencer par la narration qui est prise en charge par un personnage participant à l’enquête qui n’est pas médecin, mais journaliste. L’autre grande source d’inspiration est Jack L’Éventreur, tueur bien réel lui et qui a donné lieu à une abondante littérature au premier rang de laquelle on trouve l’un des chef d’oeuvre d’Alan Moore, From Hell. Ces deux références sont parfaitement assumées puisque l’auteur en fait mention par le truchement de son narrateur. S’ajoute à cela des moyens d’enquête modernes basés sur la psychologie (profilage) et la science (police scientifique). Les évènements se déroulent dans le New York de la fin du 19ème siècle, peu après ceux de Jack L’Éventreur, alors que Théodore Roosevelt est à la tête de la police et l’enquête est confiée à un groupe pluridisciplinaire qui opère en marge des standards de la police. ...

Wayward Pines 1

J’aurais du me méfier de cette phrase promotionnelle figurant sur la quatrième de couverture. Les fans de Stephen King, Peter Straub ou F. Paul Wilson vont adorer ce thriller complètement captivant. Je ne suis pas un grand fan du maître de l’horreur, mais je pense que ce Wayward Pines est quelques crans en dessous de sa production moyenne. La comparaison n’est certainement pas anodine puisque l’on pourrait trouver des points communs avec Dôme1. Je ne sais plus comment j’ai entendu parler de ce livre – certainement à cause de son adaptation en série télé –, mais je me suis dit pourquoi pas. Eh bien, non ce n’était pas une bonne idée. ...

Millenium T1

Je ne sais pas ni pourquoi ni comment – certainement l’esprit de contradiction – j’avais échappé à vague d’enthousiasme qui a touché la France lorsque Actes Sud a publié la trilogie de Stieg Larsson. Le fait est qu’une vingtaine d’années plus tard, en quête d’un bon polar, je me suis dit “pourquoi pas” et je n’ai pas été déçu. On entre vite dans l’histoire et la lecture est plaisante, le roman est peut-être un peu long – mais c’est un mauvais reproche. ...

L’Affaire Thomas Royer

Je ne lis pas habituellement ce type de romans. Je le dis sans prétention ni volonté de dénigrer le genre, c’est un fait et pourtant j’ai bien apprécié. La lecture est aisée, l’écriture est claire et efficace et on avance très rapidement dans la roman. Les ficelles sont un peu grosses, mais je dois reconnaître que ça marche – au moins sur moi. Voilà pour la forme, mais sur le fond, où l’auteur veut-il en venir ? ...

Le Journaliste et l’Assassin

Le journaliste qui n’est ni trop bête ni trop imbu de lui-même pour regarder les choses en face le sait bien: ce qu’il fait est moralement indéfendable. Emmanuel Carrère a tout résumé dans cette préface à la nouvelle édition et, en tant qu’auteur de non-fiction écrivant sur des faits-divers – comme dans l’excellent L’Adversaire –, n’est d’ailleurs pas tout à fait d’accord avec cette phrase de Janet Malcolm qui constitue à la fois l’incipit et le noeud du livre. La relation particulière entre l’auteur (le journaliste) et le sujet (l’inculpé) est décortiquée dans le cadre d’une affaire particulièrement litigieuse, celle de Jeffrey MacDonald accusé d’avoir tué sa famille (sa femme enceinte ainsi que ses deux petites filles). Lors de son procès, il a passé un contrat avec le journaliste Joe McGinniss pour que celui-ci rédige un livre sur cette affaire. Il a honoré sa part du contrat, mais le contenu n’était pas du goût de l’accusé à tel point qu’il a intenté au journaliste un procès en diffamation. ...

6 août 2024 ·  Noir  ♥

Quand sort la recluse

Au bout du 11ème volume des aventures du commissaire Adamsberg on a compris la mécanique des romans de Fred Vargas. Ce sont des enquêtes très décousues qui suivent une logique que même le commissaire – le seul en capacité de comprendre – a du mal à suivre. Il se laisse guider par son instinct. Il y a toujours la vie de la brigade avec ses personnalités bigarrées. Et enfin un élément étrange, souvent tiré d’une ancienne légende – ici la recluse –, sert de fil rouge. ...

Sambre

Alice Géraud nous raconte une sordide histoire de viols. Un homme a sévi pendant des dizaines d’années autour de la Sambre dans le nord-est de la France. C’était à une époque où les tueurs et les violeurs en série ne remplissaient pas encore les écrans télé – c’était avant les affaires Marc Dutroux, Michel Fourniret et Guy Georges. Les profilers, l’analyse des données, le bornage téléphonique et la police scientifique n’existaient pas encore. Mais est-ce vraiment une excuse ? Ce qui semblait occuper les enquêteurs à cette époque préhistorique par rapport à la révolution #MeToo était plutôt la guerre entre la police et la gendarmerie et la tendance à minimiser le sort de victimes quand ce n’était pas les culpabiliser pour leur comportement ou leur tenue. ...

L'emprise

Je n’avais pas lu Marc Dugain depuis très longtemps – depuis la Malédiction d’Edgard peut-être. Puis, à l’occasion de la sortie de son livre Tsunami, j’ai entendu parler de son précédent thriller politique dont le premier volet est L’emprise. Alors qu’en dire ? Les premières choses qui me viennent à l’esprit sont les similitudes qu’il présente avec la série TV Baron Noir – c’est dire la référence. Il contient quelques réflexions politiques intéressantes. ...

Xavier Dupont de Ligonnès

Qui n’a pas entendu parler de l’affaire Xavier Dupont de Ligonnès (XDDL) ? Je me suis intéressé à ce sujet après avoir écouté avec un vif intérêt la série de podcasts Mécanique du journalisme consacrée à l’enquête menée par quatre journalistes du magazine Society. Elle raconte leur travail méticuleux qui a donné lieu à ce long article publié en deux volets à partir de juillet 2020 et repris ici en livre. Ces livraisons du magazine ont connu un énorme succès qui s’est concrétisé par plusieurs tirages et une exposition accrue du quinzomadaire. ...

Temps glaciaires

J’aime bien lire un Fred Vargas de temps en temps. J’ai un peu de de retard – le douzième épisode, Sur la dalle, vient de sortir –, j’ai lu L’armée furieuse il y a un an. A plus haute dose ce serait ennuyeux, mais j’avoue que je prends plaisir à retrouver tous les ingrédients qui font que l’on aime – ou que l’on n’aime pas – les romans de Fred Vargas mettant en scène son commissaire Adamsberg: le flou, le brouillard dans lequel évoluent les enquêtes, les dialogues incessants et fleuris, la ménagerie du commissariat avec ces personnages hauts en couleur, un peu d’histoire et toujours un élément mystérieux. On y entre comme dans un lieu connu où l’on retrouve des connaissances que l’on aime bien. ...

La fille de Deauville

La fille de Deauville c’est Joëlle Aubron, elle n’a que 23 ans à l’époque. Elle est l’archétype de la fille rebelle qui a délaissé son milieu bourgeois pour vivre une vie de bohème. D’abord les squats et la drogue, puis les rencontres l’ont amené vers l’activisme de gauche. C’était une époque où cet activisme ne se pratiquait pas sur les plateaux télé ou sur Twitter, mais par des terroristes sur le terrain à grandes rafales de fusil d’assaut. C’était l’époque de la Fraction armée rouge en Allemagne et des brigades rouges en Italie. Elle a rejoint Jean-Marc Rouillan et Nathalie Ménigon au sein du groupe terroriste communiste français Action directe (AD). ...

Des hommes sans nom

Quand j’ai appris que Marc Dugain dirigeait une toute nouvelle collection de romans d’espionnage chez Gallimard, j’ai eu envie de voir ce que ça donnait. Pourquoi lui pour une telle collection ? Tout d’abord parce qu’il est un écrivain qui a écrit des livres dans ce registre comme La malédiction d’Edgar ensuite parce qu’il connaît très bien cet univers, celui des espions. Le premier livre de cette collection s’intitule Des hommes sans nom. ...

Clara et la Pénombre

Je n’avais plus lu José Carlos Somoza depuis la Caverne des idées – ça remonte à quelques années. Même s’il ne fait pas partie d’une collection “noir”, je classe ce roman dans le genre “roman noir” – et là aussi ça faisait longtemps. Somoza aime creuser le sillon d’un sujet complexe et original. Quand nous mûrissons, nous comprenons enfin que la vérité est un point intermédiaire. C’est comme si nos yeux s’accoutumaient à la vie. Nous comprenons que le jour et la nuit, et peut-être la vie et la mort, ne sont que des degrés d’un même clair-obscur. Nous découvrons que la vérité, la seule qui mérite ce nom, est la pénombre. ...

Donbass

Benoît Vitkine est journaliste au journal Le Monde, spécialiste de l’ex-URSS et de l’Europe de l’Est, il est lauréat du prix Albert-Londres de la presse écrite en 2019, pour une série d’enquêtes consacrées à l’influence russe et à la guerre du Donbass. On peut dire qu’il connaît bien le contexte et nous aussi finalement à cause de l’actualité les noms des principales villes de la région Donetsk et Lougansk nous sont familiers. ...

L’armée furieuse

J’appréhendais un peu mes retrouvailles avec Fred Vargas et son célèbre commissaire après plus de 10 ans de séparation – ma dernière lecture était le précédent opus, Un lieu incertain. A l’époque j’étais assez fan de ses romans et je lisais chaque nouvelle histoire du commissaire et de sa brigade d’originaux dès sa sortie. J’aimais particulièrement deux choses le côté instinctif, flou rêveur à l’opposé de la rationalité et la légende souvent à la lisière du fantastique qui était toujours le fil rouge de l’histoire. ...

La Serpe

Philippe Jaenada n’aime rien moins que disséquer les anciennes affaires – ce que les américains nomment les cold cases. Ici, il s’intéresse à ce qui est connu comme le triple homicide du château d’Escoire. Cette nuit, parmi les quatre personnes présentes au château, Henri Girard est le seul survivant et donc le principal suspect. Celui qui n’est pas encore devenu Georges Arnaud l’auteur du Salaire de la peur, devient du même coup le seul héritier de cette riche famille. J’ai essayé de ne pas trop en dire, mais on devine sans mal qu’il y a de la matière et plus qu’il n’en faut à Jaenada qui n’a pas besoin d’autant tant il est prolixe. On ne s’en plaint pas – au moins au début –, car il est un bon compagnon, celui que l’on aime écouter pendant des heures nous raconter une histoire – et il vaut mieux parce qu’elle est longue cette histoire. C’est le roi de l’anecdote et de la digression à un point que j’avais rarement vu – pour ne pas dire jamais. Disons qu’il faut aimer les bavardages. ...

La méprise

Après avoir lu L’Inconnu de la poste et surtout après avoir écouté l’émission À voix nue consacrée à Florence Aubenas, j’ai eu envie de lire un autre de ses livres. Mon envie n’avait pas à voir avec son écriture, mais plutôt avec ce qu’elle est et ce qu’elle a accompli, son courage, son engagement, sa volonté et ses convictions. Mon choix s’est porté sur La méprise tout simplement parce que j’étais intrigué par cette affaire d’Outreau. J’étais jeune au moment des faits et j’en avais simplement entendu parler au journal télévisé – tout de même à de nombreuses reprises. Je regardais cette affaire de loin sans trop comprendre comment et pourquoi autant de personnes étaient impliquées, j’ai donc voulu en savoir plus – et j’ai certainement été aussi poussé par un peu de curiosité malsaine. Sur ce dernier point, je n’ai pas été déçu. ...

Blizzard

Blizzard est un premier roman et une belle petite réussite. Pourtant, j’avais de quoi à être sceptique après avoir croisé les sempiternelles “jointures qui blanchissent” après seulement une trentaine de pages. […] je me tiens à la rampe de l’escalier du plus fort que je peux, pour ne pas tomber, je la serre jusqu’à blanchir les jointures de mes mains. L’intrigue se déroule dans les grands espaces de l’Alaska, mais est paradoxalement très resserrée, presque anxiogène par son ambiance. Le lecteur va la vivre au travers de quatre personnages dans ce que l’on pourrait appeler un huis clos – encore une fois malgré les grands espaces – auxquels Marie Vingtras donne la parole à tour de rôle au sein de très courts chapitres qui s’emboîtent comme des pièces de puzzle pour en révéler petit à petit des éléments. ...

L’Inconnu de la poste

Dès que j’ai vu le nom de Florence Aubenas associé à un fait divers, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à ces quelques lignes à la fin d’un article de Libération signé par la journaliste qui ont éveillé la curiosité d’Emmanuel Carrère pour l’affaire Jean-Claude Romand et qui ont donné lieu à l’un des tout meilleurs livres, L’Adversaire, traitant d’un crime depuis celui que l’on cite toujours lorsque l’on évoque ce type d’ouvrage, le De sang-froid1 de Truman Capote. La comparaison s’arrête là. L’Inconnu de la poste n’est pas dans une oeuvre qui restera dans l’histoire, mais un livre qui n’a pas cette ambition et qui se contente plus modestement de relater des faits qui de par leur nature ne nécessitent pas d’adjonctions pour intéresser le lecteur. ...

23 févr. 2021 ·  Noir  ♥

American Tabloid

James Ellroy s’intéresse aux évènements qui animèrent les deux faces – pas si antagonistes que ça – de l’Amérique, la politique et la mafia, entre les 22 novembre 1958 et 1963. Pendant ces 5 années il va se passer beaucoup de choses et Ellroy nous les raconte à sa façon dans un mélange de dialogues qui semblent pris sur le vif et de reproductions de divers documents: rapports, correspondances, retranscriptions d’écoutes téléphoniques, etc. Comme souvent chez lui c’est très dense et un peu difficile à suivre, disons qu’il faut s’accrocher. J’ai eu la chance d’avoir vu, juste avant de démarrer la lecture, le film The Irishman the Martin Scorsese qui se déroule à la même époque et qui a en commun avec ce livre l’un des personnages réel, James Riddle Hoffa. Car ce roman – comme la plupart des autres romans d’Ellroy me semble-t-il – a la particularité d’entremêler des personnages réels Jimmy Hoffa donc, les Kennedy évidemment mais aussi un Howard Hughes fatigué et le terrible et toujours en forme John Edgar Hoover et des personnages de fiction, il sont trois: le bon Ward Little, la brute Pete Bondurant et le truand Kemper Boyd. ...