Pucelle

Florence Dupré la Tour raconte son enfance au sein d’une famille catholique bourgeoise. Le récit se polarise rapidement sur l’opposition homme / femme. La domination exercée par les hommes au sein de la société est incarnée par la figure de son père qui est l’archétype du mâle blanc riche qui n’a aucune interaction avec ses enfants et ne se préoccupe de la vie de la famille que pour partir en vacances. Puis la position de la femme soumise qui consacre tout son temps à sa famille. Et enfin celle des petites filles, l’autrice et sa soeur jumelle, qui sont laissée dans l’ignorance de la sexualité et semblent être uniquement destinées à se marier et à procréer à leur tour dans un cycle sans fin. ...

6 juin 2025 ·  BD

Arcadie

J’ai été tellement séduit par l’écriture de La Treizième Heure, tellement étonné par une telle originalité que j’ai décidé de lire cet autre roman d’Emmanuelle Bayamack-Tam. Je savais où je mettais les pieds et je n’ai donc pas été surpris de retrouver de nombreuses similitudes. Pour être honnête, je l’ai quand même été car la ressemblance est grande. Les romans se déroulent au sein de ce qu’il convient d’appeler une secte qui rassemble disons des non-conformistes – c’est un doux euphémisme – dirigée par un homme – un gourou, appelons les choses par leur nom. Au sein de cette communauté l’un des personnages principaux prénommé(e) Farah a la particularité d’être intersexué(e), c’est-à-dire qu’elle ou il se trouve à la frontière entre homme et femme, en quête d’identité. Les similitudes s’arrêtent là et les histoires sont tout de même bien différentes. ...

Le chien gardien d'étoiles

Le chien est le meilleur ami de l’homme et il vrai que la fidélité sans faille qu’il voue à son maître, sa loyauté en fait un témoin privilégié de la vie des hommes. C’est le fil rouge – et même un peu plus que ça – de cette série de Takashi Murakami dont les volumes sont ici regroupés en intégrale. Ce que l’on pourrait prendre au début pour une suite de nouvelles est en fait un ensemble cohérent intelligemment connecté. Mais si les chiens en constituent la colonne vertébrale, ces histoires ne parlent pas tant d’eux que de leur maître. Ils sont les compagnons d’infortune d’hommes et de femmes qui traversent des moments difficiles au sein d’une société qui n’est pas tendre avec les faibles. Cet amour inconditionnel que le chien porte à son maître contraste avec le regard de la société qui juge, qui discrimine et qui peut exclure du jour au lendemain – ce que l’on appelle le déclassement. Pour le chien, même dans la difficulté, le maître est un dieu, il incarne la perfection, un idéal qui ne sera jamais égalé, son estime reste la même. Il est ainsi un compagnon fidèle pour ceux qui souffrent. ...

10 mars 2025 ·  BD  ♥

Combats et métamorphoses d'une femme

J’ai commis l’erreur de lire d’abord Monique s’évade dont les évènements se déroulent chronologiquement après ceux de ce livre. Dans ce premier tome des évasions de Monique, la mère d’Edouard Louis, son fils nous raconte – et parle aussi à sa mère – des bribes de sa vie difficile d’avant – la partie combat –, la façon dont elle est enfin parvenue à s’émanciper d’un mari alcoolique et toxique – combat toujours – et enfin son épanouissement et sa transformation – la partie métamorphose – dans sa nouvelle vie. ...

La Treizième Heure

Je voulais lire depuis longtemps un roman d’Emmanuelle Bayamack-Tam – ou l’un de ceux publiés sous son pseudonyme Rebecca Lighieri. J’avais prévu de débuter par Arcadie, mais ce roman plus récent m’est tombé entre les mains – je crois savoir qu’ils présentent quelques similitudes. Il est question d’une communauté religieuse composée de marginaux – le terme freak est aussi employé par l’un des personnage. Leurs psaumes sont des alexandrins, leur bible est écrite par les plus grand poètes. On y croise des identités de genres et des orientations sexuelles multiples. Au sein de cette communauté, le lecteur va suivre plus particulièrement son fondateur et l’histoire compliquée de sa famille. Dans cette famille non conventionnelle tout est exacerbé, comme si tout était vécu avec plus de force. ...

Monique s'évade

Ce livre que vous lisez est, en un certain sens, le résultat d’une commande de ma mère. Après Combat et métamorphose d’une femme dans lequel Edouard Louis raconte comment sa mère, Monique, était enfin parvenue à quitter son mari qui exerçait une emprise sur elle, elle a suggéré à son fils d’écrire un nouveau chapitre de sa vie. Depuis que tu as fait ce livre [Combat et métamorphose d’une femme], j’ai encore beaucoup changé. Il faudra que tu l’écrives un jour ! Je me suis encore transformée. ...

L'effondrement

Ce roman, comme les autres romans autobiographique d’Edouard Louis, est poignant. Il est poignant parce qu’il est dur et vrai. L’alcoolisme, la violence et la mort. Les traumatismes de l’enfance ne guérissent jamais. Son frère a été rabaissé et rejeté par son père, il n’a pas eu la force de surmonter cette blessure et s’est suicidé à petit feu. Dans le milieu défavorisé qui l’a vu naître, et dans lequel il a toujours vécu, il n’y a pas grand chose pour s’accrocher, aucune prise stable, tout glisse et se dérobe. ...

Frontier

Je suis tombé sous le charme de cet univers et des dessins dès les toutes premières pages – autant dire que la suite de cette note n’est pas objective. Commençons par là, les personnages semblent être tirés d’un jeu vidéo – ils sont trop mignons. Les décors sur les planètes, dans l’espace et surtout dans les différents vaisseaux et autres stations spatiales sont géniaux. Il démontre une inventivité, un bon goût couplé à un souci du détail qui est de l’ordre du perfectionnisme voire de l’obsession. Le résultat est époustouflant, on en prend plein les yeux et on peut s’arrêter de longs moments sur une case pour en apprécier le raffinement. ...

17 mai 2024 ·  BD  ♥

Les altruistes

Pour commencer je dois avouer que je suis un très bon client des romanciers américains dans le style – pour simplifier – de Jonathan Franzen. Je parle d’histoires contemporaines, souvent des histoires de famille ou des histoires d’amour. J’ai découvert Andrew Ridker à l’occasion de la sortie récente de son dernier roman – que j’ai bien envie de lire –, Hope. Les altruistes est son premier roman et on est clairement dans l’histoire familiale ou comment les traumatismes se transmettent de génération en génération. Il reprend le thème du péché originel qui, bien enfoui au tréfonds des consciences, pourrit lentement avant d’exploser au grand jour. Au passage, le patriarcat en prend un bon coup. Le livre sur ce point, mais aussi plus généralement, est drôle et très second degré. ...

Le père Goriot

Je possède ce Folio depuis que l’on m’a demandé de l’acheter dans le cadre des cours de Français au collège – ou au lycée. A l’époque, je ne l’avais pas lu, seulement certaines parties – le strict minimum. Depuis, de temps en temps, il se rappelait à moi et j’ai enfin sauté le pas. Il n’y a pas de principes, il n’y a que des évènements ; il n’y a pas de lois, il n’y a que des circonstances : l’homme supérieur épouse les évènements et les circonstances pour les conduire. ...

Un week-end dans le Michigan

Premier livre de la tétralogie qu’a consacré Richard Ford à son héros Frank Bascombe, l’écrivain devenu journaliste sportif – et pas l’inverse. Il date un peu, mais cette série, qui porte le nom de son héros, est considérée comme une pièce maîtresse de l’auteur américain. Ce côté un peu daté ne m’a pas gêné, c’était une autre époque qui a ses codes et ses conventions. Frank n’a pas été épargné par la vie, mais il est parvenu à surnager. Il se satisfait de son métier qui semble être un pis-aller à celui d’écrivain et tente de retrouver l’âme soeur. Au travers des rencontres de son personnage, Richard Ford veut explorer la vie des hommes dans ce pays, à cette époque. Il partage avec son héros une préférence marquée pour la ruralité. ...

Que notre joie demeure

En littérature comme ailleurs il faut dépasser ses préjugés. Et je dois avouer que sur ce point, Kevin Lambert m’a donné une bonne leçon. Lorsque j’ai vu apparaître son visage dans les journaux et sur les écrans suite à la polémique déclenchée par son collègue écrivain Nicolas Mathieu à propos de l’intervention d’un sensitive reader – et donc d’une suspicion de censure, gros mot de la littérature – dans le processus d’édition du livre du québécois. La polémique a souvent l’effet inverse de celui recherché et un doute a commencé à poindre dans mon esprit. Et si je passais à côté de quelque chose ? ...

Ceux du Nord-Ouest

C’est la première fois que je lis Zadie Smith et l’expérience est très convaincante. Ce roman comme son titre nous le suggère prend ses racines dans les quartiers du Nord-Ouest de Londres. L’éditeur compare ce roman au Mrs Dalloway de Virginia Woolf – pourquoi pas. Il raconte l’évolution parallèle, mais bien différente, de deux amies. De leur jeunesse à l’âge adulte. Cette narration n’est pas effectuée dans l’ordre chronologique, mais selon un tempo savamment orchestré. Et, c’est dans cette écriture qu’elle excelle, dans les dialogues à la fois externes, entre les personnages, et internes, dans la tête des personnages, ce que l’on appelle le courant de conscience. ...

Assemblage

Natasha Brown est une jeune romancière britannique et Assemblage est son premier roman. Un roman sur le thème de l’intégration d’une jeune femme noire – qui a dû lutter contre ce double préjugé – dans l’Angleterre post-coloniale de la noblesse. L’écriture est moderne, très neutre, voire complètement dénuée d’émotion. Un courant de conscience qui saute volontairement brutalement de contexte pour mieux s’installer dans la tête du personnage. Elle reflète la froideur, le détachement extrême et clinique de ce personnage qui a pourtant brillamment réussi. Par ce comportement, elle semble montrer son refus d’intégrer cette société alors qu’elle a tout donné et est même allée jusqu’à se renier pour parvenir à ce niveau. Un peu à la manière d’un marathonien qui, devançant largement ses adversaires, déciderait de s’arrêter juste avant de franchir la ligne, comme pour prouver qu’il peut y arriver et être meilleur que tout le monde tout en montrant qu’il ne rentre pas dans ce jeu. C’est plus qu’une désillusion, un désenchantement total, comme si rejoindre ce monde revenait à lui donner raison, à l’approuver. ...

Les Liens artificiels

La couverture donne le ton, Narcisse amoureux de son reflet dans un smartphone. Donc un roman sur le metaverse voilà une idée qui n’est pas nouvelle puisque l’on doit son apparition en littérature à Neal Stephenson, mais qui constitue toujours un projet autant prometteur que compliqué à mettre en oeuvre. Le jeune Nathan Devers – c’est un pseudonyme – s’en tire très bien. Ici ce n’est pas dans le science-fiction, mais plutôt de la très légère anticipation, puisque tout ce qui est décrit existe déjà plus ou moins. Si j’osais, je dirais de l’anticipation à la Houellebecq avec son invention du médicament du bonheur dans Sérotonine, ce n’est pas la réalité, mais ce n’est pas très loin non plus. Il s’empare très bien de ce sujet en en saisissant les aspects économiques et sociétal qui ont déjà commencé à faire des ravages en transposant la vie des gens – je veux dire par là ce à quoi ils attachent le plus d’importance – dans le monde numérique. Aujourd’hui, celui des divers réseaux sociaux où ils s’incarnent en d’autres eux-mêmes – une version différente souvent améliorée d’eux-même – et demain dans un univers qui sera plus vaste et dans lequel ils auront le loisir de vivre une autre vie. ...

Le Monde à tes pieds

Le monde à tes pieds est une BD de l’auteur espagnol, Nadar qui traite d’un sujet de société, le déclassement. Le déclassement est en sociologie le fait de descendre l’échelle sociale, cela pour un individu, un groupe ou une catégorie. Il peut concerner en particulier le marché du travail. Le déclassement est une composante de la mobilité sociale.Le terme est employé à la fois pour traiter une perte d’emploi, de statut social, ou une situation dans laquelle l’emploi occupé n’est pas au niveau de ceux promis par son niveau de formation, et au niveau collectif et intergénérationnel il qualifie le fait pour une part des représentants d’une génération de ne pas parvenir à un emploi, une position sociale, une qualification ou seulement un pouvoir d’achat de même niveau que ceux des parents. (Wikipédia) ...

25 mars 2023 ·  BD

Amalia

J’aime beaucoup Aude Picault – d’habitude quand je commence comme ça, ce n’est pas bon signe –, et j’ai suivi assez assidûment depuis des années son travail. Ce n’est pas un travail autobiographique à proprement parler, mais il s’inspire de ses expériences et de ses préoccupations du moment – ce qui est assez compréhensible. Je ne vais pas refaire toute l’histoire, mais j’en étais resté à l’évocation de la maternité dans Idéal Standard, ici elle s’intéresse à la phase d’après, la vie d’un couple d’actifs avec un enfant en bas âge et une ado à la maison – et toutes les joyeusetés qui vont avec. On a à peu près droit à tout – et à tous les clichés – la belle fille qui rêve d’être influenceuse, le petit enfant qui demande beaucoup d’énergie, le travail qui devient agile – youpi –, la libido qui décline et le tout qui mène invariablement à une grosse remise en question – pour ne pas dire une dépression ou un burn out. ...

4 nov. 2022 ·  BD

Fungirl

Autant je dois bien avouer avoir accroché à l’humour plus que limite de Megg, Mogg & Owl dans Zone de crise autant là ça n’a pas été le cas. Mais alors pas du tout, j’ai dû me forcer pour terminer ce one shot – je sais ce n’est pas bien, en même temps c’est assez rapide à lire. Rien ne m’a plu, ni l’histoire – il n’y en a pas, mais ce n’est pas très grave, c’est le principe –, ni les personnages – un trio amoureux loin d’être convaincant – ni les dessins – le parti pris est original, mais le résultat décevant –, ni les dialogues – je n’ai pas esquissé le moindre sourire. C’est un enchaînement de transgressions qui n’ont d’autres intérêts que de transgresser. ...

26 août 2022 ·  BD

Trente ans et des poussières

Trente ans et des poussières et pas une ride – je dis ça car le livre a lui aussi désormais trente ans et des poussières (1992). Le tout début correspond exactement à ce à quoi je m’attendais. Les années 80, ça sent la cigarette et l’alcool, c’est revigorant, la vie décadente – on est assez loin du healthy des années 2020. La soirée se brisa en petits morceaux, mosaïque d’éclats brillants aux formes bizarres coagulés par l’alcool. ...

Zone de crise

Si les personnages avec leurs têtes de personnages de dessins-animés – inspirés d’ailleurs de la série pour enfant Meg and Mog – pourraient laisser planer un doute, la lecture des premières pages va rapidement le balayer. La lecture de ce livre est à réserver à un public averti. Pour résumer, il s’agit d’une sorte de South Park dont chaque membre faisant partie communauté LGBTQI+ – comme le dit Diesel le fils de Werewolf Jones –, est complètement dépravé, porté sur les drogues et le sexe et le tout non censuré – à côté South Park ressemble à un dessin animé bienveillant comme Les Bisounours. Bref, vous êtes avertis. ...

26 juil. 2022 ·  BD  ♥