The goal

The goal est un classique parmi les livres dédiés à l’optimisation de la production industrielle datant de l’époque où les termes gestion de production et recherche opérationnelles étaient encore largement employés, les années 80. Il date d’avant l’avènement du lean popularisé par Toyota. Avant de revenir au fond parlons de la forme car elle reste encore originale plus de 30 ans après. Il s’agit d’un genre particulier portant le doux nom de business novel, c’est à dire d’une oeuvre de fiction traitant d’un sujet technique dans le but d’en illustrer les principes – de les vulgariser diront les aigris. Et il est intéressant de constater que cette forme est plus que jamais d’actualité puisque le best seller du moment dans le domaine de l’IT, The Phoenix Project a adopté exactement la même forme. Je crois d’ailleurs que la filiation entre ces deux oeuvres est pleinement assumée. Dans le premier, le patron d’une usine doit la sauver de la fermeture, dans le second un homme est parachuté à la tête de l’IT et doit sauver son entreprise – rien que ça. J’ai franchi un pas de plus puisque je n’ai pas lu le roman, mais son adaptation en bande dessinée. C’est donc un business graphic novel – ce qui est encore plus rare. ...

Le monde englouti

Ce roman du mythique écrivain anglais James Graham Ballard dont le nom est souvent abrégé en J. G. Ballard est l’un des romans du cycle des Quatre apocalypses. Tous écrits dans les années 60, ils imaginent l’humanité confrontée à plusieurs fléaux: montée des eaux, tempête, canicule et fossilisation. Dans celui dont il est question ici, la montée des eaux est une conséquence d’un sujet qui est plus que jamais d’actualité: le réchauffement climatique – même si ici il est lié a des explosions solaires et non à la décision de Donald Trump. Il s’en suit une montée des eaux et l’établissement d’un climat tropical dans nos contrées européennes, les anciens écosystèmes tropicaux étant devenus inhabitables poussant l’ensemble de la population à un exode permanent, toujours plus au nord. La planète est recouverte d’eau. Les villes sont totalement immergées et seuls les sommets de certains immeubles ou de certaines tours émergent. L’ensemble de la planète a donc effectuée une remontée dans le temps. Elle se retrouve dans un état qui ressemble un peu à la fin de la période paléozoïque dominée par les poissons, les fougères et les reptiles. Certains en ont assez de fuir et préféreraient opérer un retour vers la nature, mais l’homme en tant que mammifère terrestre est désormais particulièrement inadapté à son environnement. ...

Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier

Patrick Modiano creuse toujours le même sillon. Celui de son enfance et des souvenirs évanescents. Des noms, des lieux qui emergent à la surface de sa conscience et qui peu à peu prennent forme sans jamais se clarifier complètement. De cette période trouble de l’occupation et de l’après guerre. Il l’a fait sous les traits de multiples personnages, celui de Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier, comme d’autres avant lui, se prénomme Jean, Jean Daragane. ...

Entre amis

Je ne lis pas souvent des nouvelles, mais j’avais entendu parler de ce recueil il y a très longtemps, peut-être lors d’une émission de La Dispute. Elles sont homogènes et forment un tout. Elles mettent en scène les mêmes personnages ont une unité de temps et surtout de lieu. Elles se suivent, finalement un peu à la manière des chapitres d’un livre. Leur sujet, ce qu’elles dépeignent c’est ce lieu si particulier qu’est le Kibboutz. ...

La Leçon d'anatomie

C’est fou comme les romans de Philip Roth peuvent être différents. Autant Némésis que j’ai lu récemment est clair et limpide, se lit facilement, coule tout seul tout en étant très travaillé et parfaitement réalisé, autant ceux du cycle Nathan Zuckerman sont sinueux, complexes et pour résumer torturés. Je conseillerais les premiers à tout lecteur – pour ne pas dire n’importe quel lecteur ce qui pourrait sembler péjoratif – et je réserverais les autres à un public d’avertis qui a déjà beaucoup lu et qui est à la recherche de quelque chose de moins conventionnel, de plus profond voire d’expérimental. ...

Némésis

Némésis est le dernier roman du cycle éponyme et le dernier roman de Philip Roth avant qu’il raccroche définitivement pour attendre le Nobel et son entrée dans la Pléiade – ça, c’est fait. Ce roman n’a rien à voir avec ceux du cycle Nathan Zuckerman qui est certainement le plus connu. Autant je trouve que les romans mettant en scène Nathan Zuckerman sont denses et complexes – tout simplement difficiles à lire pour dire les choses – autant je trouve que ce livre et d’autres comme Le Complot contre l’Amérique sont l’exact opposé, simples et accessibles. Il est curieux de trouver une telle différence chez un auteur, d’autres sont plus homogènes – Auster ou Modiano par exemple. Cette simplicité n’enlève rien à la qualité de ce roman, il est très réussi – on s’en doute, il ne pouvait pas partir sur un échec quand même. ...

Klezmer T2

Dans ce second tome (vous pouvez lire l’article consacré au premier ici), c’est vraiment la joie qui domine, celle incomparable transmise par la musique. Cette sensation est parfaitement rendue, on a l’impression de participer à la fête. Des éléments comme la scène isolée dans la salle de bain ou le récit enchâssé du conte narré par Tchokola sont des respirations, des contrepoints qui donnent de l’ampleur au récit. Tout ceci fait de ce tome le point d’orgue de la série. ...

25 mars 2018 ·  BD

La classe de rétho

Antoine Compagnon est un historien de la littérature française, professeur au Collège de France et l’un des plus grands spécialistes de Marcel Proust. Je vous passe son cursus complet, mais il n’y a pas besoin d’en rajouter pour se convaincre que nous n’avons pas affaire au premier venu. J’admire le savoir de cet homme que j’ai eu l’occasion d’écouter plusieurs fois lors de ses passages à la radio ou dans le cadre de ses cours disponibles en podcast et j’apprécie son humilité et sa façon de transmettre ses connaissances. ...

Harry Potter T1

Comme pour Game of Thrones je dois être le dernier arriéré à n’avoir ni lu ni vu la série des Harry Potter. La raison est un simple et bête entêtement à ne pas vouloir voir les films avant d’avoir lu les livres dont ils sont tirés – une obsession comme une autre. Un évènement et un contexte propice m’ont mis le pied à l’étrier. L’évènement est l’écoute d’une passionnante série d’émissions de La compagnie des auteurs consacrée à l’oeuvre de J. K. Rowling. J’ai été à la fois surpris et fasciné d’entendre tous ces universitaires disserter de cette série tout au long des quatre heures d’émissions. Les parties qui m’ont le plus intéressé portent sur le travail de traduction qui a été réalisé par Jean-François Ménard et sur celui des références philosophiques compilées par Marianne Chaillan dans son livre Harry Potter à l’École de la Philosophie1. Les vacances de Noël ont été le contexte idéal pour entreprendre cette lecture – histoire de retomber un peu en enfance. Afin de les préparer comme il se doit, je me suis procuré les sept tomes que compte la série – je ne fais jamais les choses à moitié – dans la première édition de la collection Folio Junior. Alors quel est le verdict ? ...

Rue des boutiques obscures

La simple évocation du nom de Modiano convoque toute une idée de la littérature des quarante dernières années. Rue des Boutiques Obscures est certainement l’un de ses romans les plus connus, peut-être parce qu’il fut couronné par le prix Goncourt en 1978. Si je devais qualifier ce roman sur le fond en quelques mots, je dirais: quête identitaire, mémoire, disparition et mystère. Non, il ne m’avait pas reconnu. Personne ne me reconnaissait. ...

L'Âge des lettres

En vérité, il ne s’agit ni de se comparer ni de s’identifier, mais trente-cinq ans après sa mort, de revenir, comme je le fais souvent dans ma tête, sur notre amitié, d’en parcourir les étapes, de fouiller dans ma mémoire, de retrouver ce que je lui dois, de lui rendre grâce pour ce qu’il m’a donné, pour les progrès qu’il m’a fait faire. Le “je” est Antoine Compagnon dont les titres et les fonctions sont difficiles à résumer, mais qui, pour faire simple est l’un des plus grands spécialistes de la littérature en France. Le “il” qui a aussi occupé une chaire au Collège de France, celui que l’on ne présente plus, – sauf à Nicolas Sarkozy qui prononce son nom comme celui du gardien de but de l’équipe de France de 1998 – Roland Barthes. ...

Aâma T4

Toutes les bonnes choses ont une fin et parfois, il faut bien le reconnaître, c’est un mal pour un bien. Ce quatrième et dernier tome m’a donc un peu déçu – la déception est à l’aune des espérances. Frederik Peeters a dû s’éclater sur les dessins, il faut dire qu’il fallait qu’ils soient à la hauteur pour suivre ce scenario qui se termine par un feu d’artifice, la grande explosion on plonge dans le psychédélique – n’ayons pas peur des mots. Sur ce terrain, rien à dire, on ne peut qu’être admiratif devant le résultat, on en prend plein les yeux. C’est la fin de l’histoire – que certains qualifient d’ambitieuse – qui cette fois m’a laissé sceptique. Je ne m’attendais pas à cela et je n’ai pas été convaincu. J’ai peut-être raté quelque chose, il m’a certainement perdu en route, mais je trouve que l’on est loin de la finesse du premier volume et de la grande aventure très réussie des deux suivants. ...

1 oct. 2016 ·  BD

Le Seigneur des Anneaux T1

Depuis ma redécouverte du Hobbit – grâce à un hors-série du Magazine littéraire –, je tourne autour du Seigneur des anneaux. L’écoute d’émissions de radio consacrées à l’auteur (le très bon Une vie une oeuvre notamment) ont fini de me convaincre. Le temps est venu. J’ai mis la main sur mon vieil exemplaire publié en 1988 dans la collection “Folio Junior” et c’est parti. Je l’adore, il m’a suivi un peu partout. Enfant j’avais lu Bilbo le Hobbit et avais souhaité poursuivre l’aventure. J’avais tout simplement calé. J’étais péniblement parvenu à sortir de la Comté, les préparatifs de l’anniversaire de Bilbo avaient eu raison de mes forces. ...

Klezmer T1

Raconter les choses comme elles se sont vraiment produites, c’est tellement moche que ça devrait être interdit. Je t’invente une histoire, c’est la moindre des politesses. Lorsque j’ai lu Klezmer pour la première fois, j’ai été tellement séduit par le travail à l’aquarelle que j’ai acheté une petite boîte de peinture de voyage. De retour à la maison je me suis mis à reproduire la vue d’Odessa, tout en bleu pétrole et Orange coucher de soleil, qui est reprise dans la préface – je l’ai toujours et je garde un bon souvenir de cette expérience. ...

14 août 2016 ·  BD  ♥

Dans les forêts de Sibérie

Sylvain Tesson entre dans la catégorie des écrivains voyageurs. Comme ses illustres prédécesseurs il parcourt le globe et nous raconte ses aventures. Une fois n’est pas coutume, il a décidé de se sédentariser, mais rassurez-vous, il ne va pas nous raconter son Intérieur comme Thomas Clerc, non, ce serait trop simple. Lui décide plutôt d’aller se planquer dans une cabane au bord du lac Baïkal où il fait un peu frais en hiver – -30 environ – et où les voisins ne se bousculent pas au portillon – les plus proches, si l’on excepte les animaux sauvages, sont à plusieurs heures de marche. ...

Tous les soirs du monde

Tous les soirs du monde c’est pareil. Simon appelle son papa pour ce que l’on nomme communément le rituel du coucher. Ce n’est pas une petite affaire, il s’agit tout de même d’endormir la planète: l’Afrique, les mers, les déserts, etc. A chaque étape il remonte un peu plus la couverture pendant que que Simon s’avance tranquillement dans le monde des rêves. La progression par étapes successives plaît beaucoup aux enfants, les textes sont courts simples et poétiques. Ce livre est construit en doubles pages. L’une est consacrée à Simon et à la silhouette de son papa (on ne le voit jamais entièrement) la suivante aux parties du monde qu’il endort. Ces dernières sont particulièrement bien réussies car ce sont de grandes fresques peintes. Elles sont magnifiques, le dessinateur est parvenu à trouver une parfaite harmonie entre les couleurs et le mouvement. ...

Spin

Un bon livre de SF de temps en temps c’est vraiment appréciable surtout lorsque c’est bien fait comme ici dans Spin. Il faut avouer que la production de science-fiction est globalement de bonne qualité – rien a voir avec la fantasy, c’est mon avis – et recèle même quelques pépites comme l’excellentissime Hypérion. Sans être un grand connaisseur, je peux me risquer à dire que Spin se situe dans le haut du panier – mon risque est calculé il fut lauréat du prix Hugo du roman en 2006. ...

Légendes de la Garde T3

Prenons le temps de revenir sur l’un des mythes fondateurs de la garde qui fut aussi l’un des héros du tome précédent : Celanawe aussi connu sous le nom de la Hache Noire. Retour dans le passé donc, pour nous intéresser à ce qui a forgé cette légende – je ne peux pas m’empêcher de faire le parallèle avec le personnage de Bragon de La Quête de l’oiseau du temps. Je ne vais pas être objectif puisque les Légendes de la Garde est une série que j’apprécie tout particulièrement et ce tome ne fait pas exception, même si je dois avouer qu’il est un ton en dessous du précédent. Dans le tome précédent, le lecteur était invité à suivre l’histoire depuis plusieurs points de vues. Ici David Petersen a opté pour la linéarité alors qu’il aurait très bien pu choisir – et le sujet s’y prêtait pourtant bien – de narrer la légende de la Hache Noire tout en continuant à faire avancer son histoire. Dommage. ...

4 sept. 2015 ·  BD

La Horde du Contrevent

La Horde du contrevent est un roman de fantasy – bien que je situerais plutôt le roman entre la fantasy et la SF – écrit par un auteur français, Alain Damasio, qui a rencontré un beau succès. La preuve en est que je suis tombé sur ce titre en parcourant la liste de la bibliothèque idéale de la fantasy proposée par le Cafard Cosmique – une référence en la matière. Eh oui, parfois ça me prend comme ça et je me dis “je me lirais bien un roman de fantasy”. Je ne me suis pas laissé impressionné par le nombre de pages (plus de 700) et j’ai attaqué la lecture bille en tête sans a priori. ...

Discours à l’Académie suédoise

Le discours prononcé par Patrick Modiano à l’occasion de la remise de son prix Nobel de littérature a été édité par Gallimard, comme pour les autres livres de l’auteur, dans la collection “NRF” – le timing n’a pas été bon car il aurait pu figurer en bonne place dans le Quarto rassemblant la majorité de ses romans 1. Tout le monde connaît Modiano pour ses hésitations lorsqu’il s’exprime à l’oral qui passent souvent pour de la timidité. Tout le monde était donc curieux de voir comment il allait se tirer d’un tel exercice. Je n’ai pas eu cette curiosité, j’ai préféré attendre la parution du texte pour le savourer tranquillement. Et dès les premières lignes de son discours, il répond de très belle manière aux curieux. ...